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Les abbayes cisterciennes de Provence

Abbayes cisterciennes

Sénanque, Silvacane, Le Thoronet - Plus de 900 ans d'histoire 1098-2022

L'ordre de Cîteaux a fêté en 1998 son neuvième centenaire. L'abbaye mère de Bourgogne fut fondée en 1098 par Robert de Molesme. Son objectif principal consistait à retrouver l'esprit de la Règle de Saint Benoît de Nursie en réaction à l'apparat de Cluny. Pauvreté, isolement, uniformité, travail et prière furent les fondements des « moines blancs ». Ces traits étaient contenus dans la Charte de charité, constitution fondamentale de l'ordre rédigée en 1119 par le troisième abbé Etienne Harding. En Provence, l'architecture des trois « sours » reflète cette austérité qui regroupa dans toute l'Europe 343 abbayes en 1153 avec Saint Bernard et 694 en 1300. Plusieurs manifestations célébrant la révolution cistercienne auront lieu dans les deux monastères d'où les moines sont partis : Silvacane et Le Thoronet. Les trois symboles provençaux de ce monachisme apparurent au XIIe siècle pour survivre jusqu'à aujourd'hui.
        L'abbaye de Sénanque, près de Gordes, s'inscrit parfaitement dans l'expansion cistercienne. Son architecture est sobre et dépouillée. Aucun vitrail coloré, aucune statue ou peinture, aucun tympan sculpté ou magnifique clocher ne doit venir perturber le recueillement des moines. Après un apogée au début du XIIIe siècle, l'abbaye déclina au XIVe. Malgré un sursaut, l'insurrection vaudoise la frappa profondément en 1544. Fin XVIIe, seulement deux moines habitaient les lieux. La Révolution apparaît alors paradoxalement comme une chance. Achetée comme bien national en 1791, elle fut préservée et consolidée. Revendue en 1854 à un ecclésiastique, elle connut des vicissitudes liées à la politique anticléricale de la Troisième République. Puis, les moines partis quelques dizaines d'années à Lérins revinrent définitivement en 1989.
Le monastère primitif a été conservé dans sa totalité à l'exception de l'aile des convers rebâtie au XVIIIe siècle. L'édifice se compose d'une église, d'un cloître, d'un dortoir et de bâtiments conventuels. La nef de l'église couverte en berceau sans doubleaux est constituée de cinq travées. Une ample  coupole sur trompes chapeaute le croisé du transept. L'abside semi-circulaire est percée de trois fenêtres symbolisant le Trinité. Un mur ajouré d'une « roue » dans le croisillon droit marque l'emplacement du tombeau d'un seigneur de Venasque.
Le dépouillement de l'architecture doit favoriser le dialogue avec Dieu.
Dans le cloître, les galeries voûtées en berceau plein cintre avec doubleaux reposent sur des consoles sculptées. Les arcs de décharge abritent chacun deux groupes de colonnettes géminées. La décoration des chapiteaux, feuillages, fleurs, palmettes et entrelacs, reste très sobre. Tout autour du cloître sont disposés les bâtiments conventuels : salle capitulaire, chauffoir, réfectoire et bâtiment des convers. Le dortoir se trouve près du chauffoir.
        Plus au sud, les deux autres abbayes, monuments d'Etat, ne sont plus habitées depuis longtemps. La particularité de Silvacane relève de sa fondation au XIe siècle par des moines de Saint Victor de Marseille. L'établissement installé au milieu d'une forêt de roseaux, Sylvacana, fut rattaché à Cîteaux. Puis, en 1147, il reçut une donation de Guillaume de la Roque et de Raymond des Baux. Cependant, la protection des grands seigneurs de Provence n'empêcha pas un violent conflit avec l'abbaye de Montmajour en 1289. Le sac du seigneur d'Aubignan et les gelées de 1364 marquèrent le déclin du monastère. Cette périodes'acheva en 1443 avec l'annexion au chapitre de la cathédrale Saint Sauveur d'Aix. Eglise paroissiale de la Roque-d'Anthéron au début du siècle suivant, elle connut des dégradations liées aux guerres de religion. A l'abandon depuis la Révolution, elle fut rachetée par l'Etat en 1949 et restaurée depuis lors. Les bâtiment furent adaptés au terrain en pente.
Entre Lorgues et Le Luc dans le Var, se trouve la troisième « soeur »
L'abbaye du Thoronet fut élevée au XIIe siècle. Comme Sénanque, l'église de style roman provençal ne possède pas de portail mais deux portes latérales. Le mur extérieur du lieu de culte comporte un enfeus ou « dépositoire » pour les morts du village, élément rare dans cette région. Eglise, cloître et bâtiment conventuels donnent l'impression d'un ensemble hors du commun, d'une harmonie universelle.
Dans ces deux dernières abbayes trois photographes donneront leur vision des lieux : Bogdan Konopka, Anne Favret, Patrick Manez. Au Thoronet, quatre concert referont vivre l'abbatiale. Jean-Paul Poletti et les Polyphonies de Sartène inspirés par des chants franciscains débuteront le 25 septembre. Le lendemain, se produira le groupe A Filetta. Un ensemble arménien de Marseille, Keram, continuera le 2 octobre. Enfin, vous pourrez écouter Stephan Micus, « passeur » de musiques traditionnelles.
Emmanuel Boutinard
Photographies Emmanuel Boutinard- Juin 1998 - Abbaye de Silvacane, Bouches du Rhône

Abbaye de Sénanque, Gordes, tél. 04 90 72 05 72
Abbaye de Silvacane, La Roque d'Anthéron, tél. 04 42 50 41 69
Abbaye du Thoronet, Le Thoronet, tél. 04 94 60 43 90




Photographies Emmanuel BOUTINARD Octobre 2005 - Abbaye du Thoronet, Var